Le saviez-vous ?

Sur les gestes individuels

Les gestes individuels peuvent contribuer à 1/4 de l’effort à faire pour atteindre les objectifs fixés par l’Accord de Paris. Les 3/4 restants relèvent des industries, de l’État, de changements globaux et structurels.

Source : The Shift Project

Le saviez-vous ?

Sur l’empreinte carbone des mails.

L’envoi d’un mail avec une pièce jointe de 1 Mo, c’est 19 grammes de C02 émis et une consommation électrique équivalente à celle d’une ampoule pendant une heure.

En France, en moyenne, chaque salarié d’une entreprise de moins de 100 personnes envoie 33 mails par jour, soit l’équivalent de 1000 km parcourus en voiture. Cela représente 14 allers retours Paris-NY par an.

Source : ADEME

La femme trop maquillée et le vieux contrôleur (juillet 2018)

Paris-Avignon. En ce début de voyage, je me détends et, bercée par le roulis du train, m’assoupis un peu. A quelques sièges de moi, une femme trop maquillée s’anime. Le vieux contrôleur aussi. Sans doute une affaire de carte de réduction oubliée. Je m’enfonce dans mon fauteuil et me perds dans mes pensées.

Mais, dans le brouhaha de la conversation entre la femme trop maquillée et le vieux contrôleur, quelques mots percent mes rêveries. Grève, SNCF, gouvernement, service public… Il n’en fallait pas plus pour que je me redresse et tende l’oreille.

Je n’entends pas les questions de la femme trop maquillée mais les devine aux longues réponses que lui apporte le vieux contrôleur. Il parle posément. Il lui explique le statut des cheminots qui ne roulent pas sur l’or, les raisons du déficit de la SNCF qui ne sont pas celles qu’on croit, les dangers de la privatisation et qui vivra verra… Et il en vient aux valeurs fondamentales du service public, aux dégâts du libéralisme,… et pousse le discours jusqu’au problème de la sémantique utilisée par le gouvernement et les médias dominants. Il parle bien, avec un peu de véhémence mais sans agressivité, avec quelques jolies touches d’humour. Il répond avec une patience d’ange aux arguments qu’elle lui oppose.

Le cercle de discussion s’élargit. Un homme cravaté appuie les dires du vieux contrôleur. Derrière lui, une femme de la soixantaine acquiesce du menton. Un autre passager que je ne peux pas voir de mon fauteuil dit quelques mots encourageants. Je suis trop loin pour intervenir mais soutiens le vieux contrôleur d’un sourire. Les échanges sont passionnés mais l’atmosphère reste douce. Le vieux contrôleur a cette aura apaisante qu’on gagne sans doute avec l’âge. Il dit tout ce qu’il faut dire. Je n’aurais pas fait mieux.

Les échanges ont duré une trentaine de minutes. Je me renfonce dans mon fauteuil, réjouie par cette jolie scène. Qui a dit que les Français n’en ont que faire de la politique ? Elle est là, au cœur de chacun, et il s’en faut d’un rien pour la faire jaillir dans les repas de famille, à la cantine, sur le marché… ou dans un train qui roule sans heurt vers le sud.

Dimanche matin pluvieux (mars 2018)

Cela fait partie des choses qu’on vous dit, qu’on vous a racontées, que vous savez déjà : militer en dehors des périodes électorales n’est pas chose facile et frise l’ingratitude, le ridicule parfois.

Dimanche matin d’un mois d’avril qui s’obstine à faire pleuvoir de fines gouttes sur nos têtes. Dimanche matin du mois où s’amorce un mouvement social dont on sait l’issue décisive.

Dimanche matin sur le marché où les passants rentrent la tête dans leur manteau pour se protéger du vent froid.

J’arrive là, fière d’avoir eu le courage de décoller du lit, de laisser les mômes seuls à la maison pendant 2h avec l’instruction de prendre leur bain, d’enfourcher mon vélo, sans oublier les tracts.

Nous sommes trois. Les deux autres sont les fidèles, les forcenées de la diffusion de tracts du dimanche matin, les inépuisables. Elles sont à la retraite et plus vaillantes que des jeunes filles.

Ce matin, les inépuisables ont l’air épuisé. Le gris du ciel et le manque de bras ébranlent leur vaillance. « Nous sommes toutes les trois. », me dit l’une. « Et les autres, ils roupillent ? » s’agace l’autre. Légitime impatience de ceux qui continuent à batailler vaille que vaille.

Avec un sourire dont je sais qu’il n’aura pas le pouvoir de chasser la morosité qui imbibe le moindre centimètre carré du marché, je m’y mets : à coup de « bonjour », à coup de slogans, à coup de mains tendues vers l’autre pour qu’il attrape au vol le tract du moment.

Beaucoup gardent la tête enfoncée dans leur manteau et les mains dans leurs poches. Ils se protègent du vent froid et des mots qu’on leur tend. Quelques-uns prennent le tract sans arrêter et nous gratifient d’un sourire timide, triste ou compatissant.

En voici un qui s’arrête. Il parcourt le papier d’un œil et me pose quelques questions vagues. Cela a suffit à éveiller ma verve et j’énonce les idées, les raisons, la colère… Mais, rapidement, sachant bien qu’il ne faut pas monopoliser la parole, je l’interroge à mon tour. Il ne répond pas vraiment. Il finit par me dire : « Moi, vous savez, la politique, je m’en fous complètement. Je me suis arrêté car vous êtes jolie ».

A mon tour de rentrer la tête dans mon manteau. Je pense au café chaud, aux enfants dans leur bain… J’ai bien envie de repartir là tout de suite me glisser dans mon confort chaleureux. Pourtant mon bras continue à balancer du tract vers le passant. Je sais qu’il faut tenir. Ne serait-ce que pour elles, les inépuisables, dont le bras a la vigueur d’une jeune fille.

Puis, un homme de mon âge, habillé dans un négligé étudié qui ne manque pas de chic, arrive vers moi avec une jolie fillette. Il refuse mon tract d’un geste autain que confirment une moue dédaigneuse et ces mots : « Franchement, vous n’avez que ça à faire ! ».

Qui est-il celui-là pour me balancer son mépris à la gueule ? Il n’est pas d’accord ? Soit ! Qu’il vienne discuter !

Agacé, mon cerveau se réveille de la léthargie dans laquelle il sombrait, impulse à mes muscles une force nouvelle, à mon cœur de la conviction. Et la colère se meut très vite en joie. Je sais pourquoi je suis là. Pour ne pas laisser le monde être façonné par ceux-là, avec leurs certitudes et leur condescendance.

Je reprends. La pluie a cessé. Un rayon de soleil perce les nuages gris. Je vais vers eux avec le sourire, de la bienveillance et un peu d’humour. D’autres militants arrivent en s’excusant du retard. On finira en chantant.

Après la pluie, le beau temps.

Sur le désespoir des gens qui ont une vie confortable

Tous ceux-là, autour de vous, ne vont pas bien.

Vous ne pouvez pas leur dire qu’il n’y a pas de quoi : le monde tel qu’il tourne (ou se détourne, devrait-on dire, de l’essentiel ou du bon chemin s’il en est un) est quelque peu désespérant. Difficile d’aller bien dans un monde qui va mal.

Mais, tous ceux-là, autour de vous, fixent leur attention sur un petit problème, un détail personnel, souvent matériel. Ils pensent que tout vient de là. Ils en parlent des heures, y enroulent leur pensée, s’y recroquevillent, s’y perdent.

Alors dîtes leur, à tous ceux-là, autour de vous, dîtes leur de regarder plus haut, plus large.

Parfois le petit problème n’existe pas ou à peine : il est une façon bien naturelle de catalyser un sentiment diffus de mal-être sur un sujet concret. Le vrai problème n’est pas l’étole de soie perdue ou la voiture qui ne démarre pas. Il est ce sentiment d’impuissance face à la dérive d’une société, d’une civilisation.

Quand le petit problème existe, il n’est que l’appendice de maux plus vastes. Des tensions au boulot ? Voyez donc les ravages du new management. Une rhinopharingite chronique ou des maux de ventre tous les soirs ? Intéressez-vous aux causes de la pollution et aux modes de production de ce qu’on mange. Des journées trop chargées ? Analysez les intérêts qu’il y a à vous faire aller si vite. Et ainsi de suite…

Alors, dîtes leur, dîtes leur bien qu’il n’y a qu’un seul remède : se battre, se relever de cette résignation, refuser les journées trop chargées, s’indigner de la destruction à marche forcée de la planète, oublier l’étole de soie perdue… et lutter, lutter avec acharnement, avec enthousiasme, colère et générosité, lutter avec les autres car nous sommes des millions.

Cliché

Au mur, il y a une photo. Non, pardon, il y a des photos mais je n’en vois qu’une, la seule en noir et blanc dans une série de portraits. Sur toutes les autres, le kitch de la tenue des protagonistes jure sur un fond pastel rose ou bleu.
Au mur blanc, cette photo en noir blanc, plus grande que les autres. Les contrastes sont forts et le grain soigné. Son auteur est un mec qui sait y faire. Au centre de la photo, un homme droit comme un « i ». à ses côtés, un cheval au pelage brillant et une profondeur de champ qui court jusqu’aux montagnes.
Il est habillé de vêtements simples et fluides dans lesquels son corps noueux de vieil homme paraît se perdre. Sous le chapeau de paille, son visage buriné reste éclairé par le soleil qui, par un subtil jeu d’ombres, souligne les rigoles du temps. Sa mine est sévère mais sans fâcherie. On y lit de la fierté et non de l’arrogance. Le cigare entre les dents participe sans doute de cette posture noble. Ses yeux clairs adressent un regard franc. Ils sont animés d’une lueur si vive que l’on pourrait un instant percevoir de la couleur dans ce tableau monochrome.
On m’indique qu’il s’agit du frère. Il s’appelle Marcello. Comme beaucoup ici, il travaille à la plantation de tabac.
Dans le soir qui tombe, je me surprends à fredonner une chanson qui porte son nom et m’emmène vers des souvenirs anciens. Détachant mes yeux du soleil qui rougit par la fenêtre, je reviens à la photo. Elle est belle. Il est si digne.
Et voici qu’elle s’anime, prend des couleurs et parle.

Par la fenêtre ouverte à droite des portraits vient de me saluer Marcello. Il rentre du boulot.
Même dignité, même cigare, même chemise ouverte sur le torse hâlé. Il est peut-être moins vieux. Son regard aussi vert que sévère m’intimide.
Je m’attends à une poignée de main virile et quelques grognements en guise de bonsoir.

Mais Marcello me claque la bise. Il me parle sans s’apercevoir que je ne comprends rien. Il me parle avec un fort accent et les mains. Tant et si bien que je me retrouve à ses côtés sur la terrasse.
Il s’installe dans l’un des rocking-chairs, s’y balance avec satisfaction puis m’invite d’un geste à l’imiter. Je m’y assois lentement et impulse un imperceptible mouvement au fauteuil à bascules comme pour me faire oublier.
Marcello se marre. Je ne sais pas pourquoi. Je suppose qu’il est content.
Son rire se tait mais ses yeux gardent un sourire presque polisson. Sans un mot, il me regarde et lève un doigt à la hauteur de son visage, à la manière d’un magicien qui appelle à la concentration sur son prochain tour. Il tire de sa poche trois larges feuilles de tabac. Ses doigts déchirent, s’animent, tassent et roulent deux cigares impeccables. Marcello est un magicien.
Il me tend l’un des deux. Je refuse. Il insiste et l’allume pour moi. Je tousse. Il me fait signe de ne pas avaler. Je me détends, me balance ; j’y prends goût. Puis il me sert un verre de rhum. J’hésite, y trempe les lèvres. Bientôt j’y prends goût aussi.
Il se marre à nouveau. Et se met à parler avec une telle alacrité que, sans savoir ce qu’il raconte, je ris aussi. J’observe qu’à plusieurs reprises, tout en parlant, il soulève la ceinture de son pantalon, y plonge l’une de ses larges mains et se remet les couilles en place. Il faut croire que le balancement un peu franc du fauteuil les déstabilise car il répète ce geste avec le naturel de quelqu’un qui se recoiffe. Il me pose quelques questions et répète chacune de mes réponses deux ou trois fois en hochant la tête comme quelqu’un qui vient d’apprendre une chose importante.

Souvent aussi il se tait comme pour mieux savourer l’instant. Il me jette alors un regard complice et semble attendre que j’approuve d’un sourire la beauté du ciel étoilé, le doux mouvement du rocking-chair, la sensation du rhum qui coule dans la gorge et le sang, la saveur du cigare, la douceur de l’air et les montagnes qui se dessinent au loin dans le ciel noir.

Marcello est bien l’homme digne et franc que j’ai d’abord observé en noir et blanc. Mais la photo ne disait pas ceci : son goût de vivre et de partager.

Les yeux d’Elsa

C’est une vieille femme. Je ne la connais pas.
Elle parle une langue que je comprends mal ; je n’aurais pas pu écouter ses confidences.
Je ne la connais pas. Et pourtant.

J’ai vu dans son regard adamantin une force tranquille, une vivacité d’esprit.

J’ai aperçu, saillant ses bras menus, les muscles d’une vie de labeur. Elle avait les gestes précis d’une couturière. J’ai goûté sa soupe noire. Elle savait faire avec les moyens du bord sans trop se soucier de raffinement culinaire.

Au ton détaché de sa voix, s’entendait l’ironie tendre des gens qui ont vécu. Je n’étais pas chez elle depuis 2h qu’elle se moquait de mon empressement à vouloir l’aider et m’indiquait d’un clin d’oeil que son mari, lui, ne l’aidait pas.

Parfois, ses prunelles se figeaient, traversées par une lueur de mélancolie sitôt chassée par les tâches à faire, la famille qui débarque, le voisin qui demande un coup de main.

Son sourire des yeux disait une bienveillance sans excès, un respect de l’autre, une humanité. Elle m’a appris des mots d’espagnol en détachant les syllabes avec la patience d’une institutrice. Elle a mis dans mon sac de quoi boire et manger sans que je m’en aperçoive.

Elle a tourné les talons sitôt après m’avoir dit adieu en me pressant la main comme on rassure un enfant. Elle savait transmettre leur chaleur sans laisser déborder les sentiments.
Son regard d’aigle bleu a accompagné tout le reste de mon voyage.

Je ne la connais pas. Et pourtant.
Pourtant, si j’apprenais sa mort demain, je pleurerais Elsa.

Réponse à l’appel fait par F. Nyssen au monde de la culture « à agir en faveur des migrants »

“Madame la ministre de la Culture,

Vous avez convié certain.e.s d’entre nous à la fin de l’automne à un dîner pour parler de nos différentes actions auprès des exilé.e.s qui cherchent actuellement refuge en France. Nous vous avons proposé alors d’organiser une commission dont nous étions prêt.e.s à prendre la charge, afin d’établir un dialogue avec le ministère de l’Intérieur. Nous avons insisté sur la nécessité et l’urgence d’ouvrir ce dialogue entre les artistes, les acteur.trice.s culturel.le.s et le ministère de l’Intérieur, dialogue sans lequel tous nos efforts, tout notre travail en direction des milliers d’exilé.e.s restent une goutte d’eau dans l’océan des violences qu’ils et elles subissent aujourd’hui sur notre territoire, dans cette France qui pour elles et eux représentait pourtant la patrie des droits de l’homme, une terre d’asile et de refuge, et qui n’est plus aujourd’hui, pour ces femmes, ces enfants et ces hommes, qu’un endroit de violence et de rejet. Notre demande est restée lettre morte.

Vous avez lancé récemment un appel au milieu culturel et artistique à faciliter aux exilé.e.s l’accès à la culture, à développer des ateliers artistiques avec elles et eux, pour les aider à patienter le long des files d’attentes administratives.

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Sur le travail comme servitude volontaire

« Je doute que toute la philosophie du monde parvienne à supprimer l’esclavage : on en changera tout au plus le nom. Je suis capable d’imaginer des formes de servitude pires que les nôtres, parce que plus insidieuses : soit qu’on réussisse à transformer les hommes en machines stupides et satisfaites, qui se croient libres alors qu’elles sont asservies, soit qu’on développe chez eux, à l’exclusion des loisirs et des plaisirs humains, un goût du travail aussi forcené que la passion de la guerre chez les races barbares.
A cette servitude de l’esprit ou de l’imagination, je préfère encore notre esclavage de fait. »

YOURCENAR Marguerite, Mémoires d’Hadrien, 1951

Le sourire des fillettes

Le sourire, c’est un peu comme la pomme ou le zizi de la chanson, il y en a de toutes les sortes.

Passons sur le timide, l’enjôleur, le forcé, le triste et beaucoup d’autres.

Arrêtons-nous un instant sur le plus beau : celui qui vient de l’intérieur, qui a le pouvoir de réconforter, de guérir, d’égayer, celui qui donne un parfum suave à la vie, celui de la joie. Celui-là, ne pas y renoncer. Jamais.

Attardons-nous sur celui que l’on impose aux lèvres des fillettes dès leur plus jeune âge. C’est le sourire de l’enfant polie et avenante, de la femme aimable et séduisante.

La petite fille l’adopte comme une règle parmi d’autres et s’imagine bientôt qu’il lui faut s’en parer pour ne pas être rejetée. Elle grandit et en fait un outil de survie qui lui permet de tromper son monde. On s’émerveille de cette enfant si souriante.

A l’adolescence, il est toujours là, collé, masquant les affres propres à son âge. On vante son beau sourire.

Adulte, elle le porte comme un habit de tous les jours qui l’autorise à évoluer dans le monde. On admire sa grâce souriante.

Elle aurait pu finir par croire qu’il faisait partie d’elle.

Mais, sous ce vernis opaque, souvent bouillonnent l’indignation, la douleur, le chagrin.

Alors, quand, enfin seule, la fillette devenue femme, dépose son sourire comme un dentier sur la table de nuit, le magma des émotions contenues glisse sur tout son être.

Au matin, vite remettre de l’ordre pour oublier les combats de la nuit, vite poursuivre une vie qu’on lui décrit heureuse. Elle remet son sourire pour sortir de chez elle. Elle se sentirait nue sinon.

Les années passant, les sentiments enfouis créent des fêlures dans l’attitude gracieusement dessinée du visage souriant. De petites rides s’installent. Le sourire n’a plus la même innocence.

Alors, un jour, en se regardant dans la glace peut-être, elle comprend qu’il lui faut l’arracher. Elle en souffre, elle en crie, elle croit être perdue. Cela prend des mois, des années. Un immense pansement qu’il est impossible d’ôter d’un coup sec. Au début, elle le remet pour faire face à des situations qu’il lui serait impossible d’affronter sans ce puissant anesthésiant de l’âme. Mais il n’est plus collé, ne marche plus si bien. Elle finit par y renoncer complètement.

Dès lors, leur regard sur elle change. Tu as changé, lui dit-on comme un reproche. Tu ne vas pas bien, s’inquiète-t-on parfois.

Oh mais, si, elle va bien, tellement mieux.

Non, elle n’a pas changé. Elle est simplement devenue elle-même.

Elle est libre désormais. Libre de sourire. Ou pas.